Découverte

Interview : Moss

Présenté à l’E3 2017 comme le quota émotion du segment PlayStation VR de Sony, Moss nous a immédiatement séduit et il a confirmé cette première impression lors des différentes phases de gameplay où l’on a pu découvrir un titre plus malin qu’il n’y parait, proposant notamment des puzzles environnementaux qui semblent bien conçus. Et même s’il se fait discret depuis un an alors que la sortie est toujours calée pour ce mois-ci en exclusivité sur PS VR, nous souhaitions en savoir plus sur son développement et son studio, Polyarc. Nous avons donc posé plusieurs questions à Tam Armstrong, directeur du studio qui nous donne quelques pistes sur leur démarche créative ci-dessous (NDLR : Merci à Antoine pour la traduction). Pour plus d’informations sur Moss, rendez-vous sur le site officiel.

Racontez-nous les origines de Moss. Etait-ce dès le départ un projet VR ? Pourquoi avez-vous opté pour une vue à la troisième personne en réalité virtuelle ? Pensez-vous que laisser le joueur devenir la caméra revient à lui donner le contrôle sur l’histoire ?

Moss est née d’un exercice de conception d’un jeu entièrement centré autour de la réalité virtuelle. C’était l’un des objectifs de Polyarc depuis le départ, afin de comprendre les enjeux de titres en réalité virtuelle. Une autre option aurait été créer une nouvelle expérience de jeu en VR à partir de game designs déjà existant sur consoles ou PC. Nous avons choisi la première des deux options, en ayant en tête que peu de personnes suivraient cette stratégie, ce qui nous permettait de sortir du lot.

Toutes les décisions de conception que nous avons utilisées pour développer Moss, y compris le choix de la caméra, ont été décidées dans l’optique de créer une démonstration de VR unique. Notre argument central consiste à dire que si un jeu est conçu pour être véritablement natif en réalité virtuelle, cela se ressent dans ses qualités intrinsèques, tandis que les portages depuis d’autres plateformes ont tendance à amoindrir le feeling et donc les qualités du jeu. Cette perspective est enthousiasmante, car ce qui rend un jeu VR unique, c’est l’ensemble des choses qui rendent difficile la re-création de cette expérience sur une plateforme plus traditionnelle.

Cela signifie que pour Moss nous voulions être concentrés pour de proposer quelque chose de confortable et immersif par rapport à l’environnement, nous devions créer un univers réceptif aux mouvements qui permettrait au joueur de devenir le personnage et pas seulement une caméra mobile. Cela s’inscrit dans notre volonté de limiter les travelings de caméra au minimum, de s’en servir seulement lorsque cela est nécessaire. Ce raisonnement nous a conduits au résultat que vous voyez aujourd’hui avec Moss, où vous êtes capable d’atteindre et d’interagir avec les événements proches de vous au fur et à mesure que l’histoire se déroule devant vos yeux.

Qu’est ce qui marche et ce qui ne marche pas ? Pouvez-vous nous expliquer votre vision de la conception de puzzles en réalité virtuelle ?

Les mécaniques sous-jacentes de la création d’un puzzle sont plus ou moins similaires à la création de niveaux dans d’autres médias. Ainsi, bien que nous jouions avec la plupart des mécaniques de puzzle-games traditionnelles, certaines sont exclusives à la VR. Notre philosophie derrière la conception des énigmes de Moss peut être définie par trois principes clés.

Premièrement, les puzzles dans Moss reposent sur une idée simple : le joueur aura le plus souvent besoin d’observer et dénicher un ou deux indices dans la scène pour comprendre comment résoudre un casse-tête. En général, nous voulons faire en sorte que les joueurs puissent arriver au dernier mouvement nécessaire à la résolution d’un tableau après seulement quelques essais. Les puzzles de Moss requièrent ainsi un petit nombre d’actions de la part du joueur pour être résolus.

Deuxièmement, nos énigmes s’appuient sur des interactions avec les objets. Notre objectif est de créer une expérience physique interactive complète. Se sortir des challenges dans Moss rappellera aux joueurs des souvenirs de jeunesse passés devant de véritables puzzles en boites ou des jeux de construction. Le fait que les problèmes soient physiques peut aider le joueur à visualiser plus facilement la solution en imaginant les différentes pièces en mouvement.

Enfin, nous gardons à l’esprit que nos énigmes doivent offrir un confort optimal en VR, que ça soit au niveau du temps de résolution ou de la difficulté. Nous avons remarqué que le fait d’être bloqué sur un problème trop compliqué était une circonstance aggravante lorsque l’on joue avec un casque de réalité virtuelle rivé sur la tête. Les puzzles dans Moss sont conçus pour être des challenges amusants, mais évitent de vous faire ressentir l’envie de retirer le casque par agacement. L’idée est de fournir au joueur la satisfaction d’avoir résolu un problème.

Créer des jeux profonds pour cette plateforme n’a pas toujours été une priorité pour l’industrie. Qu’en pensez-vous et pourquoi est-ce le cas selon vous ?

La réalité du marché fait qu’il est très compliqué de dépenser énormément d’argent dans le développement d’un titre alors que le marché est relativement nouveau et restreint. Le volume de clients est encore assez limité en comparaison des autres plateformes. Nous sommes tous très excités en ce qui concerne le potentiel de cette technologie, cependant cela est à nuancer par rapport aux coûts de production de ces jeux et du retour sur investissement qu’ils peuvent engendrer pour les développeurs. Heureusement, nous pouvons compter sur un cercle vertueux : plus nous aurons de retours positifs de la part des joueurs et plus le public se tournera vers l’achat d’équipements de réalité virtuelle. Ainsi plus de jeux seront créés ce qui contribuera à augmenter l’intérêt pour la VR et ainsi de suite. De grands jeux sont en développement aujourd’hui, et au fur et à mesure que le marché s’étendra, nous verrons de plus en plus une diversité dans les genres proposés.

De plus en plus de jeux se refont une santé hors du casque comme Super Lucky’s Tale. Comment faites-vous en tant que développeur pour maintenir l’intérêt des joueurs pour cet appareil ?

En ce qui nous concerne, il s’agit de vraiment suivre les principes fondamentaux dont je vous parlais en introduction. Ici à Polyarc, nous avons décidé que notre stratégie reposait sur le principe de faire de jeux natifs pour les plateformes de réalité virtuelle. Quand nous parlons de jeux natifs, nous faisons référence à l’ensemble des mécaniques qui font qu’un jeu VR est unique et intéressant. Cela implique d’avoir une reconnaissance complète des mouvements de la tête et des mains. De la même manière qu’il existe des jeux qui sont parfaitement adaptés au clavier et à la souris, ou au tactile pour le mobile, il existe des jeux qui transcendent les possibilités de la VR avec des interactions physique. Nous nous concentrons sur cet aspect pour la création de nos jeux et ainsi nous espérons convaincre les joueurs de nous suivre dans cette voie.

Comment faites-vous pour concilier performances graphiques et fluidité pour rendre Moss le plus agréable possible ? Quelles sont vos astuces ?

Sur le long terme, cela implique d’avoir accès à des technologies plus innovantes qu’aujourd’hui qui permettraient d’inverser la courbe de difficulté de développement. Lorsqu’un futur casque sera capable de restituer visuellement ce que l’on souhaite, il nous sera alors possible d’améliorer les performances liées à l’affichage à l’intérieur du casque.

En attendant, nous croyons que la réponse se trouve dans le style graphique du titre. Plutôt que d’essayer d’obtenir à tout prix un rendu photo-réaliste qui impacterait le framerate et la résolution, nous essayons un parti pris radicalement différent. Nous optons ainsi pour des environnements plus marqués au niveau de la direction artistique, ce qui impacte à la fois le graphisme et les performances en termes de fluidité. De plus cela permet au titre de mieux vieillir et de ne pas perdre en qualité au fil des années.

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