Suite de deux des meilleurs jeux sortis ces dernières années, Batman: Arkham Origins était attendu au tournant. Développé par le studio de la Warner, Warner Bros Games Montréal et non plus par celui des premiers épisodes (Rocksteady) (NDLR: bien que Rocksteady collabore sur le jeu), les fans étaient préoccupés de voir la série changer de main. Il est vrai que Batman: Arkham Asylum avait autant enchanté les fans de jeux vidéo que ceux du héros de chez DC (fait rare dans l’industrie), et le second volet avait lui aussi réussi à avoir un succès critique et commercial amplement mérité. Alors que devons-nous attendre de ce troisième volet qui raconte les débuts de l’homme chauve-souris ? Warner Bros. Games Montréal a-t-il réussi à reprendre le flambeau sans dénaturer la série, et éviter l’effet « version 2.5 » en réalisant un 3ème opus digne de ce nom ?
L’un des points marquants de ce nouveau volet, c’est bien l’histoire: se déroulant avant les deux premiers épisodes, Batman n’a pas encore l’aura de super héros, et est perçu comme un criminel aux yeux des policiers et des citoyens de la ville de Gotham. Il est également peu connu des malfrats: la plupart pensent même que ce dernier n’existe tout simplement pas et qu’il n’est qu’une légende. Seuls les patrons des différentes mafias s’en inquiètent, et le Chevalier Noir se retrouve avec une prime sur la tête. Le synopsis, un peu bateau, n’est malheureusement qu’un prétexte pour faire vivre au héros sa première grande enquête et poursuivit par de nombreux vilains cultes pour les fans. Ils sont d’ailleurs presque tous là, et utilisés soit dans l’histoire principale, soit durant les quêtes secondaires, ou juste en référence.
Le fan-service est bien au rendez-vous de ce coté là, mais il manque un peu de complexité pour les « connaisseurs » du super héros, qui doit généralement résoudre des enquêtes un peu plus corsées. Cependant, la psychologie de Bruce Wayne est bien exploitée, tout comme sa relation avec son majordome Alfred. Mais surtout, l’histoire qui le lie à certains grands méchants l’est encore plus. Afin d’éviter tout spoilers sur le sujet (ce qui enlèverait en plus l’un des points fort du jeu), sachez juste que Batman va rencontrer de nombreux ennemis pour la première fois et que la mythologie du comics est très bien exploitée, avec de nombreuses références, tout en réussissant à créer son propre univers. De plus, un nouvel élément vient soutenir l’histoire: un effort impressionnant a été fait sur la mise en scène (Warner Bros. oblige) et les cinématiques sont un vrai régal pour les yeux et elles aident à l’immersion. Seul petit défaut sur l’ensemble: les voix en français ne sont pas au niveau, et il est préférable de joueur en version originale.
Venons maintenant à l’essence de la série: le gameplay. Ce dernier ce compose depuis le second volet en trois parties: combat, infiltration et exploration. Bien que ce découpage soit assez classique dans les jeux d’aventure, il est ici très pointu et agréable dans toutes les phases. Les combats sont exigeants mais maniables, ce qui donne une expérience jouissive où le joueur sera le seul coupable en cas de défaite. Reposant sur un système de combinaisons mises en place depuis Batman: Arkham Asylym, Batman: Arkham Origins n’y apporte pas de grands changements et c’est tant mieux ! Il est rare que les combats au corps à corps contre plusieurs ennemis soit aussi bien rendus dans un jeu vidéo, et les différents gadgets et améliorations à débloquer donnent une vraie montée en puissance durant l’aventure. Seul les gants électriques nous apportent une touche de nouveauté, ce qui a pour effet de rendre les combats plus (trop ?) simples en fin d’aventure.
Il en est de même concernant les phases d’infiltrations. Presque aucun changement: rien d’original donc, mais toujours ce gameplay proche de la perfection. On prend un malin plaisir à éliminer l’ensemble des gardes d’une salle sans se faire repérer, passant par les conduits d’aération ou en se suspendant aux gargouilles afin de surprendre l’ennemi. La aussi, un gadget à été rajouté, permettant de propulser des objets sur les adversaires (caisses, bombonne de gaz, extincteur, etc.) ou de les suspendre directement à un des perchoirs de la pièce. Comme les gants pour les combats, ce nouvel objet amène plus de simplicité sans pour autant dénaturer le gameplay. Bonne idée donc.
L’exploration est elle un peu différente que dans Batman: Arkham City, la ville est plus vaste, mais exploite une grande partie de celle présente dans le second volet. On retrouve donc des lieux connus, mais pas encore transformés en prison, rendant l’aspect répétitif un peu moins présent. Un système de tour de relai a été implémenté, permettant d’utiliser le Batwing pour circuler plus vite d’un quartier à un autre. Ne vous emballez pas trop vite, ces passages ne sont pas jouables mais uniquement représentés par des cinématiques. Et oui, toujours pas de Batmobile tant demandée par les fans (NDLR: Au prochain peut-être ?). Mais la puissance des consoles actuelles et le moteur utilisé ne permettent surement pas, pour le moment, d’introduire des scènes dignes de ce nom avec cette dernière. Petit plus pour les fans cependant: la possibilité de faire un détour par la Batcave ( la vraie cette fois-ci…) où Alfred vous attendra et vous aidera à avancer dans l’aventure.
D’autres nouveautés, les enquêtes: en vrai détective, le joueur pourra enquêter sur des scènes de crimes et chercher les preuves afin de retrouver comment l’assassinat s’est déroulé, et trouver le détail qui permettra de retrouver le tueur et l’interpeller. Ces phases de jeux, assez bien faites et intéressantes, permettront de casser la monotonie du titre. Les énigmes de l’homme mystère sont toujours présentes, mais sentent le réchauffé, surtout pour les joueurs ayant fait les deux jeux précédent. Enfin, les éléments à analyser dans le jeu -afin de découvrir l’histoire du héros et des supers vilains (très bien intégrés dans Asylum et City)- sont ici remplacés par des tags d’Anarchy. Une fois analysés, ils débloqueront des descriptions sur la ville et ses bâtiments du point de vue d’un des méchants les moins charismatiques que Batman puisse affronter dans les comics. Bien que l’idée aurait pu être intéressante (avec un autre personnage de l’univers DC), et permettant d’en apprendre plus sur la cité mythique qu’est Gotham, une fois dans le jeu, les tags imposent d’êtres en vue détective durant toute les phases d’exploration, gâchant le bon travail fait sur les graphismes et l’atmosphère, et demande une recherche un peu trop méticuleuse, voir même chanceuse. Bref, même les fans ne seront pas motivés par cette quête secondaire. Une autre « nouveauté », difficile mais intéressante, vous demande de retrouver des écrits du créateur des grands monuments de Gotham City, Cyrus Pinkney, assassiné depuis plus d’un siècle, et ami d’un ancêtre de Bruce Wayne. Une fois encore, l’idée est là mais est mal exploitée et laisse un peu sur sa faim le fan de Batman. Enfin, les désormais classiques missions annexes mettant en scène des ennemis jurés de l’homme chauve-souris ayant choisit leur soir pour le mettre à l’épreuve, sont là mais sont moins bien intégrées à l’histoire qu’auparavant, et n’apportent pas grand chose de nouveau.
La durée de vie est tout de même conséquente, malgré une campagne plus courte, grâce aux nombreuses activités disponibles, et la présence des défis vous demandant d’affronter plusieurs adversaires, soit en combat, soit en infiltration, avec des objectifs précis. Encore une fois, un petit manque d’originalité, mais un respect des bases posées par Rocksteady. Vous pourrez également vous essayer au multijoueur (NDLR: sauf sur Nintendo Wii U où il a été supprimé pour un jeu vendu 10€ moins cher), grande nouveauté pour la licence, si vous arrivez à trouver des partenaires « online ». Constitué principalement de deathmatch (vous pouvez choisir entre Batman, Robin, et les mercenaires de Bane et du Joker), ce dernier est sympathique, si vous avez l’immense patience d’attendre qu’une partie se lance. Difficile en effet de se faire une place pour le titre en cette fin d’année, notamment à cause de Grand Theft Auto et des nombreux autres titres de qualité sortis ces dernières semaine. Espérons que la sortie du pack contenant les trois volet pour les fêtes « boostera » un peu cette partie du jeu, qui ne manque pas d’intérêt.
Ce nouveau titre de Batman a-t-il loupé le coche ? Pas de grandes nouveautés (pas de mode deux joueurs pour la campagne, pas de Batmobile, une carte somme toute similaire au deux premiers, énigmes redondantes, etc. ) quelques ralentissements et problèmes sonores. L’effet « DLC », plus que nouveau jeu, est là. Mais si l’on prend en compte que cette série était déjà proche de la perfection en de nombreux points, il était difficile pour ce nouveau studio de surpasser l’épisode précédent. Le titre reste tout de même largement au dessus de la moyenne (grâce à sa réalisation et à son gameplay) et réservera de belles surprises pour les fans de l’univers (notamment avec l’écriture des personnages). Le parallèle avec la trilogie cinématographique de Christopher Nolan est même toute trouvée: un premier volet surprenant et posant les bases, un second sensationnel et un dernier qui a du mal à sortir de l’ombre de son ainé malgré ses qualités et ses nombreux clins d’œil que seul les connaisseurs pourront apprécier. Si vous hésitez encore, et que vous n’avez pas eu l’occasion de jouer aux premiers, la trilogie est désormais disponible en un coffret et vous permettra de faire trois des meilleurs jeux de cette génération. Pour les autres, si vous avez déjà fait le tour des hits disponibles, et que vous aimez les jeux en monde ouvert qui sortent du train-train « courses/gunfights », une bonne surprise vous attendra, avec une belle réalisation et des phases de gameplay originales.
Quand aux fans de Batman en général, même si Batman: Arkham Origins est un cran en dessous du reste de la série, il reste l’un des meilleurs jeux basé sur cette licence, et tout le monde sait que les bonnes adaptations vidéo ludique se comptent (malheureusement) sur les doigts de la main.
