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Test : FAR: Lone Sails

Développé comme un projet de fin d’études à l’Université des Arts de Zurich, ce qui allait devenir FAR: Lone Sails était avant tout pour son créateur le moyen d’exprimer une approche différente de la définition du lien entre humains et véhicules dans le jeu vidéo. En s’inspirant d’oeuvres majeures comme Journey, il voulait créer une atmosphère unique qui forcerait ces connexions entre cellules et atomes. Quoi de mieux qu’une ambiance de fin du monde et une recherche de civilisation perdue, seul à bord d’un frêle esquif motorisé pour motiver son propos…

FAR: Lone Sails parlera donc aux courageux voyageurs en solitaires, qu’ils prennent la route sur terre, sur mer ou dans les airs. Dans un monde autrefois prospère, les océans ont laissé place à des déserts qui s’étendent jusqu’au-delà de l’horizon. Toute la civilisation semble anéantie depuis longtemps. Le petit héros du jeu prend lui son courage à deux mains et décide de partir vers l’inconnu à la recherche de ses semblables. Pour cela, il a construit un destrier mécanique qui va lui permettre de franchir les différents obstacles environnementaux qui vont lui barrer la route. Le jeu consiste donc à manoeuvrer ce vaisseau en solo, passant d’un poste à l’autre, exploitant l’énergie et le vent pour continuer tant bien que mal à progresser dans ce monde à l’agonie. Commander la bête ne sera pas la seule tâche à effectuer, FAR: Lone Sails demandant également de sortir de la machine, rentrer dans des bâtiments et actionner des machineries pour déployer un pont, ouvrir des portes ou rajouter des modules dans le vaisseau.

Mais avant de parler de ce qu’on y fait, évoquons d’abord ce qui saute aux yeux dès les premières minutes de jeu, la sensationnelle atmosphère de fin du monde qui émane de toute part. Rarement un jeu vidéo aura-t-il aussi bien véhiculé son propos, et ce sans dialogues ni cinématiques. Chaque panorama traversé, chaque objet posé au sol raconte une histoire. Les vélos d’enfants rouillés au milieu de l’océan, ces pancartes où « il fait bon vivre dans les Iles Bleues » qui laissent la place à des villes fantômes sur des ilots tristes, les abris sensés protégés la population qui ne sont plus que des amas de tôle invertes, tout est brillant. Les développeurs sont parfaitement conscients d’avoir ici quelque chose d’unique et n’hésitent pas à nous laisser contempler sans rien d’autre à faire qu’avancer ces paysages qui défile lentement devant nos yeux, baignés par des lumières qu’on avait plus vu dans un jeu depuis des lustres, comme peints à la gouache sur une gigantesque toile. Le summum étant lorsque le soleil décroit, que le crépuscule arrive et qu’il laisse la place à une nuit étoilée… magique.

Si ces superbes clichés pourraient nous faire oublier le pourquoi du comment de notre quête, la nature violente de ce monde décharné ramène rapidement à la réalité le joueur un peu rêveur : notre véhicule n’avancera pas tout seul ! Le gameplay du jeu s’articule tout d’abord autour de deux postes clés : l’approvisionnement en énergie du moteur et le maintien d’une pression stable dans la chambre de combustion. Il faut donc jongler et appuyer sur des boutons pour faire avaler des cubes d’énergie à au moteur et veiller à « dégazer » le trop-plein de vapeur. Rapidement, le jeu va nous offrir de nouveaux challenges. L’ajout d’une voile permettra de profiter des vents lorsqu’ils sont disponibles et ainsi économiser de l’énergie, un aspirateur de matériaux évitera de devoir arrêter sa locomotive tous les 500m pour descendre chercher des ressources et enfin l’aspect réparation du bolide se fera via un extincteur et un poste à souder qu’on récupérera eux aussi en chemin.

Et ils ne seront pas de trop, car si le jeu ne propose aucun ennemi à proprement parler, il faudra toujours se méfier de la météo et la nature hostiles : pluie violente, foudre, grêle, éruptions volcaniques, etc. autant de dangers potentiels qui pourront déclencher des incendies et au final faire exploser le coursier mécanique. Le jeu oscillera donc entre des phases contemplatives pendant de longues minutes et des instants plus rythmés où il faudra courir partout pour sauver sa vie. Enfin, les puzzles rencontrés dans des bâtiments demanderont la plupart du temps de réactiver des machines à l’aide de carburant pour progresser. Au fur et à mesure, on développe un lien unique avec son véhicule, on le sent souffrir lorsqu’il est trop exposé aux éléments où qu’il toussote lors de la montée de certains chemins escarpés et on peine avec lui lorsqu’il faut sortir le désembourber en le tirant à la main avec l’un des deux treuils situés à la proue ou la poupe. Le tout encore une fois sans dialogues, ou presque…

Car un grand pan de la narration passe par la bande sublime originale du titre. Cette musique dynamique donne un véritable coeur à l’aventure, sachant jouer des bois après la tempête pour redonner du courage au duo et battre la chamade à l’arrivée d’un danger. L’orchestre minimaliste dirigé par Joel Schoch crée une symphonie à l’image du jeu, mélancolique et emplie d’espoir. L’une des bandes originales de l’année, assurément. Enfin, nous l’avons déjà mis en avant, la photographie étourdissante du jeu raconte plus que des mots. Du design des véhicules endormis abandonnés dans cet océan de poussière aux vestiges architecturaux qui nous donnent juste envie de partir en balade pour les visiter, jusqu’aux instruments dont on se sert pour avancer, tout dans FAR raconte une histoire et on traverse cela comme si l’on regardait un diorama, émerveillé par toute cette non-vie, jusqu’à un final pour le moins touchant.

Très bon Obligé !

Inutile de tourner plus longtemps autour du pot, FAR: Lone Sails est l'une des meilleures aventures narratives de l'année. Le genre de jeu vidéo qu'on aime, qui en raconte plus par l'image et la musique en trois petites heures que certains mastodontes aux gros sabots en une soixantaine. Okomotive réussit en tout point à nous faire vivre des émotions en pagaille dans un monde pourtant vide de tout. On notera une direction photo absolument époustouflante qui produit des panoramas rares et une bande originale dynamique enchanteresse qui fait s'hérisser les poils sur les bras de bonheur. Mais là où se situe la virtuosité, c'est surtout dans la capacité du studio à développer une relation intime entre le héros sans nom et son fidèle destrier de métal sans aucune ligne de dialogue. Pour tout cela, on tire notre révérence aux jeunes Suisses et on attend leurs nouveaux contes interactifs avec impatience.

Jeu testé sur PC à partir d’une version fournie par l'éditeur. Plus d’informations sur notre politique de tests en suivant ce lien.

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