PlayStation 4

Test : Gravity Rush 2

La gravité, on en subit tous les âpres conséquences. Que ce soit par trois dents cassées après une chute aussi ridicule que violente sur le quai bondé d’une station de métro que par cette disgracieuse bedaine qui se devine à la base d’un t-shirt cintré malgré la centaine d’euros investi à l’année dans une salle de sports discount. Oui, la gravité est cruelle, mais elle a aussi de bons côtés. Car en plus de nous maintenir la tête à l’endroit sur notre bonne vieille planète, elle a permis l’éclosion de ce qui est considéré comme le meilleur jeu de la PS Vita : Gravity Rush. Une petite merveille développée par Japan Studio qui nous met dans les bottes de Kat. Une gravitéenne capable d’inverser la gravité d’un simple claquement de doigts pour se propulser où bon lui semble et se débarrasser de bestioles protéiformes qui jaillissent de failles gravitationnelles. Malgré ses quelques défauts de jeunesse et des ventes pour le moins mitigées, le jeu a connu un joli petit succès critique et compte des wagons entiers de fan qui attendaient cette suite avec la plus grande des impatiences. Mais si la magie opère toujours autant et que le jeu est d’une générosité assez folle, les défauts du premier se sont greffé à d’autres et font de Gravity Rush 2 un jeu qui horripile presqu’autant qu’il peut émerveiller.

C’est en petite culotte, marcel blanc et sans le moindre petit pouvoir qu’on retrouve la sémillante kat au beau milieu de nulle part. Accompagnée de Syd, la gravitéenne est condamnée au plancher des vaches depuis qu’elle a perdu de vue son petit chat poussière, et elle ne peut même pas compter sur l’aide de Raven qui semble s’être volatilisé par la même occasion. Les plus perspicaces d’entre vous noteront que la fin du premier Gravity Rush ne laissait pas du tout entrevoir une telle situation et je vous recommande donc de jeter un œil à ce petit animé de vingt minutes pour raccrocher les wagons et comprendre ce qui s’est passé depuis que Kat et Raven ont rétabli l’ordre à Hekseville. Une ville au parfum de paradis depuis que Kat et Syd ont été réduit au rang d’esclaves dans le village de Banga (rien à voir avec la boisson de mon enfance) où ils doivent miner toute la sainte journée pour espérer se mettre quelque chose sous la dent. Mais sans vouloir trop vous spoiler, vous vous doutez bien que Kat ne compte pas rester dans cette situation très longtemps et c’est armé de bons sentiments et le cœur sur la main qu’elle finira par retrouver tous ses pouvoirs. De quoi être en parfaite condition avant son arrivée à Jirga Para Lhao, une ville gigantesque et tout en verticalité qui offre un terrain de jeu rêvé pour une gravitéenne qui vient tout juste de récupérer ses facultés. Sans parler d’un jeu de gauche révolutionnaire porteur d’un message que seuls les plus onanistes d’entre nous sont capables d’entendre, Gravity Rush 2 propose un thème assez fort qui s’articule autour de la lutte des classes. On peut même y voir une certaine critique de la société actuelle et du gouffre qui sépare les plus riches des plus démunies. Au beau milieu de tout ça, et comme à son habitude, Kat viendra à la rescousse des nombreux protagonistes qu’elle croisera tout en essayant de trouver un moyen de rentrer au bercail. Cohérent et plutôt bien construit, le scénario de Gravity Rush 2 aurait gagné à être plus synthétique et s’abstenir de quelques longueurs plutôt inutiles. Ce qui nous aurait évité quelques allers-retours dans un jeu qui n’avait pas besoin de ça pour augmenter une durée de vie très loin d’être ridicule.

À l’époque de sa sortie, le premier Gravity Rush avait essuyé quelques critiques à propos de sa durée de vie. Parfaitement conscient de cet écueil, qui reste toutefois relatif à chacun, Japan Studio a décidé de mettre les petits plats dans les grands en étalant une bonne grosse couche de confiture sur les tartines déjà bien beurrées des joueurs. Pour vous la faire courte, si on touche un peu à tout sans se focaliser uniquement sur la trame principale, il faut bien une grosse vingtaine d’heures de jeu avant de voir défiler le vrai générique de fin. Je dis vraie car à l’image d’un certain MGS 5, le jeu propose une première fin à l’issue du troisième chapitre qui n’a pas du tout la même aura ou la puissance que la vraie fin qui vous attends après les quelques missions de l’épilogue. Pour en revenir à la durée de vie, qui n’est pas vraiment un problème ici, les complétistes et autres amateurs de trophées platines ont de quoi taquiner facilement les 50 heures de jeu avant de tout retourner. Surtout qu’en plus des missions principales et des missions annexes, le jeu regorge de défis en tous genres, certains étant même liés au multi avec des chasses au trésor ou encore un concours photo plutôt bien vu. Des activités idéales pour faire le plein de gemmes et améliorer tous les pouvoirs de Kat pour en faire une vraie brutasse que plus rien n’arrête. Malheureusement, à trop vouloir en faire, Japan Studio a peut-être poussé le curseur de la générosité un peu trop loin.

Beaucoup de joueurs vous le diront, mais Hekseville était un terrain de jeu un peu trop étroit. Surtout dans le cadre d’un open world où il est possible de filer comme le vent dans les airs. Malgré ça, les missions s’y articulaient remarquablement bien, conférant au jeu une fluidité et un rythme sans réels temps morts. Ce qui n’est pas le cas de Gravity Rush 2. En plus du village Banga, de quelques failles gravitationnelles et un autre endroit dont je vous réserve la primeur de la découverte, le jeu propose un bac à sable immense avec Jirga Para Lhao. Une ville qui s’étend aussi bien en largeur qu’en hauteur et qui propose plusieurs types d’architecture allant des bidonvilles aux quartiers luxueux grouillants de villas en passant par un complexe militaire et une zone pleine de gratte-ciels. De plus, PS4 oblige, le jeu est nettement plus vivant que son prédécesseur et la ville fourmille d’habitants qui vaquent à différentes activités. De quoi regretter le manque d’interaction qu’on peut avoir dans un GTA. Mais passons, si je laisse entendre que Gravity Rush 2 est un jeu « trop » généreux, c’est parce qu’il n’arrive pas à tirer correctement parti de sa superficie. Que ce soit dans le cadre d’une mission principale ou secondaire, le jeu s’évertue à nous faire aller d’un point A à un point B sur de très longues distances. Et tout ça sur une même mission ! Sachant que le voyage rapide ne se débloque qu’au bout d’un certain temps, les premières heures de jeu peuvent rapidement devenir pénibles pour ne pas dire même laborieuses. Le rythme du jeu est un peu trop haché et le scénario n’arrange pas les choses avec ses longueurs qui nous conduisent à des missions inintéressantes qui ne font pas spécialement avancer les choses. Des missions qui ont également tendance à s’éterniser et à proposer « la séquence de trop ». Comme celle où l’on doit faire le larbin de service pour Syd à aller lui chercher des bidules aux quatre coins de la ville pour qu’il se concocte une guitare : intérêt zéro…. À vouloir donner trop de consistance à son titre, ce qui n’est pas un mal en soi, Japan Studio a malheureusement perdu la fluidité et le rythme du premier épisode. Par contre, ils ont gardé les soucis de caméra. Et ça, on s’en serait bien passé.

Vu que je suis sur les points qui fâchent, autant rester sur ma lancée et vous parler de cette saloperie de caméra. Je dis saloperie car cette saloperie de caméra m’a limite fait saigner du nez sur l’un des chapitres du jeu tant elle est devenue incontrôlable. Du genre à virevolter dans tous les sens sans jamais se fixer alors qu’on me demandait de filer d’un endroit particulièrement étroit…. Je vous laisse imaginer l’horreur. Mais bon, là je m’énerve par ce que je suis en colère, mais la gestion de la  caméra reste plutôt correcte sur l’ensemble du jeu. Elle a juste tendance à partir en sucette lors de certains combats avec des cibles multiples et en mouvements. Ce qui est un peu plus dérangeant, c’est le manque de précision des contrôles. Un problème qui se ressent surtout sur le ciblage automatique qui nous fait souvent rater nos cibles ou encore lors des glissades gravitationnelles qui peuvent virer au grand n’importe quoi sans un minimum de contrôle du stick. Et si tous ces petits couacs ont tendance à être agaçants, irritants et parfois même horripilants, ils sont loin d’être insurmontables et ne gâchent pas un gameplay qui reste très agréable dans les grandes largeurs. On reste ainsi sur les mêmes bases que le premier épisode avec quelques petites nouveautés comme le fait de courber légèrement sa trajectoire en chute libre ou encore la mise à mort d’un boss une fois qu’il est suffisamment amoché. Pour les gros changements, c’est du côté de la gravité qu’il faut regarder puisqu’on hérite de deux petites nouvelles. La première, la gravité lunaire, permet à Kat d’être aussi légère qu’une plume pour faire des bonds de géant, faire des attaques éclaire ou balancer tout un tas de projectiles contre des ennemis à distance. Une légèreté qui contrebalance à merveille avec la gravité Jupitérienne qui alourdit kat et lui permet ainsi de briser des parois plus solides, agglomérer des éléments pour en faire un énorme projectile ou encore faire une attaque massive capable de détruire plusieurs ennemis à portée de l’onde de choc. En échange de toute cette puissance, Kat est nettement moins mobile et le but du jeu est donc d’alterner entre toutes ces gravités pour s’adapter à tous types de situations. À défaut de jouer la carte de l’originalité, le gameplay de Gravity Rush 2 se veut plus solide et avec des bases particulièrement efficaces.

L’une des plus grandes forces de Gravity Rush était sans le moindre doute possible son ambiance, son esthétique et sa patte graphique à la croisée entre les œuvres de Miyazaki et la BD franco-belge. Sa suite est du même acabit et va même plus loin avec une réalisation impeccable et des environnements plus vastes, plus variés, plus majestueux. Si l’aventure commence dans l’intimité d’un village de mineur flottant tout ce qu’il y a e plus sommaire, la suite n’est qu’une succession d’éblouissements avec la visite des failles gravitationnelles et la découverte de la majestueuse cité de Jirga Para Lhao. Une ville à l’architecture audacieuse tout en verticalité où le dépaysement est assuré en changeant simplement de quartier. Entre la beauté des lieux, la précision du trait et la chaleur de la palette de couleurs, Gravity Rush 2 est une succession de cartes postales et une invitation permanente à se faire de nouveaux fonds d’écran. De plus, si le jeu est un peu plus généreux que son prédécesseur en cinématiques, il conserve le style Visual Novel pour dépeindre son récit et conserver son lien avec la BD. Ajoutez à cela une bande-son qui s’articule impeccablement à l’action avec des mélodies qui reprennent les thèmes du premier et quelques envolées classiques du plus bel effet. Gravity Rush 2 est aussi plaisant à regarder qu’à écouter et les fans de la première heure devraient fondre dès le premier coup d’œil. Des fans qui se gargariseront sans aucun doute de l’épilogue qui en plus de lever le voile sur certaines zones d’ombre, se permet de joliment clore l’histoire avec quelques petits twists en bonus. Si une porte restera toujours ouverte pour un éventuel troisième épisode, tout dépendra des ventes de cet opus, la « vraie » fin du jeu n’a rien d’abrupte et fait de Gravity Rush 2 un jeu qui se tient à lui seul et ne laissera personne sur sa faim.

Bon

Entre ses allers-retours agaçants, sa caméra parfois sous acides et ses quelques missions totalement inutiles, je me suis demandé, l’espace de quelques minutes, si je n’allais pas coller un petit bonhomme orangé à Gravity Rush 2. Une sentence qui pourrait paraitre cruelle, mais qui serait parfaitement cohérente comparée à ce qu’était le premier épisode : une petite surprise maitrisée de bout en bout qui transpirait la magie. Ce qui n’est pas forcément le cas de cette suite. Mais Gravity Rush 2 reste un bon jeu. Un jeu solide, follement généreux, agréable à prendre en main et d’une beauté enchanteresse. Si la magie n’est plus la même, elle opère toujours autant et en plus de mériter son petit bonhomme vert, Gravity Rush 2 mérite aussi, et surtout, qu’on s’y intéresse de plus près.

Jeu testé sur PlayStation 4 à partir d’une version fournie par l'éditeur. Plus d’informations sur notre politique de tests en suivant ce lien.

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