Switch

Test : Never Stop Sneakin’

Dean Dodrill peut facilement être classé dans la catégorie des développeurs indépendants discrets qui travaillent en sous-marin pendant de longues années avant de dévoiler leurs projets. Le papa de Dust: An Elysian Tale aussi connu sous le nom de sa société Humble Hearts a en effet pris quatre ans pour tout d’abord se reposer au sortir d’un développement en solo assez éprouvant on l’imagine. Mais il a aussi mis à profit ce temps pour s’essayer à la 3D, une nouveauté pour lui avant d’annoncer enfin son prochain jeu à peine 2 mois avant sa sortie. Et attention, changement de décor pour ce Never Stop Sneakin’ qui s’offre en primeur aux possesseurs de Switch : exit les animaux mignons et l’ambiance cartoon de Dust, on passe ici à un sujet plus sérieux, en tout cas au premier abord, l’infiltration très inspirée d’un certain Metal Gear Solid. Fans d’Hideo Kojima, rangez les couteaux et desserrez les dents, on est plus ici dans la parodie que dans l’hommage, et ça se sent dès l’intro.

Ce gros pastiche de la fameuse séquence d’introduction de Snake Eater, le saut depuis l’AC-130 met directement en condition le joueur. Never Stop Sneakin’ nous met dans la peau d’un des membres du Sneakin, l’élite des agents secrets au service du drapeau américain et la mission qui nous est confiée est d’arrêter Amadeus Guildenstern, un fou qui a voyagé dans le temps pour kidnapper tous les présidents des Etats-Unis, y compris les plus discutables… On doit d’abord construire une base d’opérations et l’agrandir avec un matériel de pointe pour localiser Guildenstern et mettre un terme à sa menace d’envoyer tout ce beau monde en orbite. Oui, le scénario est absurde et c’est encore pire lorsqu’on assiste aux scènes cinématiques hilarantes qui ponctuent certains événements de la campagne. Le doublage des acteurs est d’ailleurs excellent et met bien en valeur les gags et l’écriture décapante qui semble intarissable.

Mais que cela ne nous fasse pas oublier notre mission : s’infiltrer toujours plus profondément dans la base ennemie pour y récupérer du matériel ou des ressources humaines. Car c’est là tout ce que contient véritablement la campagne de Never Stop Sneakin’. On construit un bâtiment, le boss se rend compte qu’il manque tel composant électronique ou tel expert et ordonne qu’on aille récupérer ça illico. Le moteur génère alors procéduralement une ou plusieurs séries de 3 niveaux et un boss dans un des cinq environnements du jeu et en avant pour l’infiltration. On passe donc le plus clair de son temps dans un gameplay en vue du dessous où l’on doit déjouer les rondes des ennemis, les caméras et les tourelles pour aller récolter de l’Espionnage (ESP) sur des terminaux informatiques ou dans des caches verrouillées. L’originalité vient du fait que l’on contrôle les déplacements du héros à l’aide du stick, et c’est tout !

Le jeu se charge de gérer le reste, glisser sa lame dans le dos d’un garde, tirer automatiquement en cas de repérage si l’on possède des balles dans le chargeur ou en dernier recours balancer un fumigène/grenade EMP qui permet de prendre la poudre d’escampette pour mieux revenir plus tard dans l’action. C’est un peu désarçonnant au début, mais on prend vite le pli de ce choix de game design minimaliste laissant le joueur se concentrer sur l’infiltration. Les rares échoppes en début ou fin de niveau permettent de refaire le plein de points de vie et d’acheter des bonus valables que pendant le run en cours (hausse du pourcentage d’ESP relâché par les gardes, chance de récupérer des balles ou des points de vie, bonus de vitesse du hack des terminaux, etc.). Plus on avance dans la campagne et plus le jeu offre de gadgets supplémentaires : bouclier protecteur, cape d’invisibilité par exemple, mais aussi nous challenge en ajoutant 3 niveaux de plus à explorer et des rondes de gardes plus rapprochées.

Ce sont ces petites carottes et son gameplay infiltration très agréable, car épuré et vraiment fluide qui nous font tenir puis revenir encore et encore sur le jeu, car à part elles, le jeu n’a pas grand-chose à offrir de plus. On fait rapidement le tour des environnements proposés de la jungle à la base arctique toujours empruntés à la saga Metal Gear jusqu’aux boss qui ont chacun un pattern différent, mais qui deviennent vite barbants, à force de faire les mêmes combats pendant des heures. Pourtant le jeu se targue d’une campagne d’une douzaine d’heures. Alors voilà, il joue sur les sentiments nous enlevant par exemple le temps d’attente du hacking des ordinateurs ou nous laissant accumuler les multiplicateurs de score pour gagner encore plus d’ESP et justifier l’obligation d’enchaîner 15 niveaux à la suite pour faire avancer le scénario… c’est long, très long, beaucoup trop long.

Never Stop Sneakin’ possède tout de même des qualités. On a parlé du gameplay vraiment efficace et de l’humour omniprésent dans ses dialogues. On pourrait aussi citer son esthétique PS One très réussie, jusque dans les mains cubiques des personnages (et là tout le monde se rappelle avec effroi le modèle de Cloud dans FF7…), fruit de pas mal de recherche de la part de son créateur. Autre succès qui permet d’oublier un temps la répétitivité : sa bande originale réalisée par les Irlandais de HyperDuck SoundWorks déjà à la composition de Dust qui reviennent avec des tracks inspirées des meilleures musiques de films d’espionnage et un thème à mi-chemin entre la ballade de MGS 3 et les thèmes d’ouverture des James Bond modernes, un délice qu’on réécoute en boucle… tout du moins pendant les 6 premières heures de jeu.

Moyen

Il avait vraiment tout pour plaire ce petit Never Stop Sneakin'. Un gameplay infiltration réduit à sa plus simple expression qui fonctionne étonnement très bien, une écriture décapante et maline qui emprunte des références dans tous les coins pour faire travailler les zygomatiques et une esthétique PlayStation franchement réussie. Mais c'est en tirant sur la corde jusqu'au dévidoir, rajoutant des carottes superficielles pour tenter de nous faire avaler une campagne d'une douzaine d'heures alors qu'elle aurait dû se terminer bien avant qu'il se perd en chemin, laissant le joueur lassé sur le bord de la route. On le sait, la volonté de Humble Hearts était de proposer un titre prônant les petites sessions et le reviens-y mais le jeu manque cruellement de contenu pour être apprécié sur la durée. Aussi on le recommandera uniquement aux amateurs de grind à la japonaise ou de tapotage frénétique dans les jeux mobiles aux patterns abrutissants de répétitivité. Les autres préféreront attendre une promo sur l'eShop pour le picorer en douceur.

Jeu testé sur Switch à partir d’une version fournie par le développeur. Plus d’informations sur notre politique de tests en suivant ce lien.

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