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Test : Styx: Shards of Darkness

On ne peut pas plaire à tout le monde. Les Nanterrois de Cyanide Studio le savent puisqu’ils n’ont pas rencontré l’audience espérée avec une production pourtant originale et ambitieuse : Of Orcs and Men. Cela ne les a pourtant pas découragés et ils sont revenus fin 2014 avec un jeu d’infiltration sans prétention dans l’univers de leur RPG piloté par un petit gobelin cynique avide d’ambre et peu avare en grossièretés, Styx: Master of Shadows. Succès d’estime s’il en est et bien qu’imparfait dans sa réalisation, le jeu reste pour moi l’un des meilleurs souvenirs de l’année et surtout un exemple de maîtrise du level design appliquée au genre de l’infiltration. C’est vous dire si j’attendais sa suite, Styx: Shards of Darkness. Annoncé pour 2016 puis repoussé, c’est qu’il se sera fait désirer ce Styx, mais le voilà enfin entre mes mains ! Il est temps de voir si comme on le dit, le maître est de retour !

Après avoir fait tomber la tour d’Akenash et détruit le coeur de l’Arbre-Monde, notre héros a bien mérité un peu de repos. Styx coule des jours paisibles dans sa planque sur les hauteurs de Thoben, la cité des voleurs. Sa vie se résume à l’accomplissement de petits larcins en toute impunité, mais tout va bientôt basculer puisqu’un général du C.A.R.N.A.G.E, l’autorité en charge du contrôle des verdâtres lui propose une offre qu’il ne peut pas refuser, voler un sceptre appartenant à un ambassadeur en échange d’une très grosse quantité d’ambre. Commence ainsi la quête de ce Styx: Shards of Darkness qui le mènera jusqu’à Korangar, la grande citadelle des Elfes Noirs où il découvrira les sombres desseins de la matriarche et le destin funeste de ses congénères en ces lieux. Ce faisant, notre vermine adorée traversera de nombreux environnements urbains, un sanctuaire et même une prison.

L’original ayant été reconnu pour son level design exceptionnel, nous n’en attendions pas moins de sa suite et pour dire vrai, nous ne sommes pas déçus ! Les couloirs sombres de la tour d’Akenash sont rapidement oubliés lorsqu’on découvre la majestueuse cité Elfe à flanc de colline illuminée par le soleil du soir. Les environnements étriqués et verticaux du premier épisode font place à des zones beaucoup plus vastes, un peu moins verticales, mais creusées comme du gruyère, regorgeant de passages, soupiraux traversant les bâtisses et aspérités où s’accrocher sur les murs. Toute l’architecture des niveaux est pensée pour offrir à chaque instant une porte de sortie au joueur qui aurait déclenché une alarme après avoir été un peu trop téméraire. Il en résulte une myriade de possibilités d’approche de notre objectif qui donne le tournis et c’est un vrai régal pour les amateurs d’infiltration.

Les environnements vont tous exploiter de différente façon vos forces et faiblesses et vous obligeront à changer radicalement votre manière de jouer. Misez tout dans la grimpette pour Korangar et ses falaises à escalader, écoutez aux portes et agissez dans l’ombre des baraquements dans le Village des Marchands, etc. Si le jeu vous invite régulièrement à vous la jouer speedrunner en atteignant le plus vite possible votre objectif (avec des médailles et succès à la clé), sachez que la fouille minutieuse vous octroiera des objectifs secondaires variés qui s’inscrivent dans le monde écrit par les développeurs avec des récompenses à la hauteur du défi proposé, comme par exemple de nouvelles tenues pour votre voleur qui lui confèrent des bonus/malus dans ses caractéristiques. Enfin, en chemin vous croiserez un grand nombre de PNJs dont certains qui font leur grand retour et qui feront avancer un scénario ma foi assez honnête et surtout moins intimiste que celui du premier opus.

Bonne nouvelle pour ceux qui avaient pesté sur le défaut principal de Master of Shadows : oui, les mouvements du héros ont été entièrement revus sans que cela n’impacte le feeling si particulier de la maniabilité. Styx conserve son flottement lors des sauts et sa maniabilité toute en légèreté lorsqu’il se faufile entre les gardes, mais finit les sauts dans le vide à répétition et les mauvaises appréciations des distances, le système d’accroche marche enfin au poil ! De plus, grande nouveauté, on peut enfin changer de côté sur un rebord sans avoir à se relever. Cette fluidité était vraiment attendue par les fans et c’est on remercie les développeurs d’avoir fait le job à ce niveau-là. Pour le reste du gameplay, Cyanide a conservé ce qui fonctionnait bien, la manipulation de l’ombre et la lumière pour se déplacer discrètement, la vision d’ambre pour repérer ses ennemis et le clonage, principal pouvoir du gobelin.

En consommant de l’ambre, Styx peut ainsi créer un double de lui-même et s’en servir à distance pour franchir des obstacles, distraire l’ennemi, déclencher des pièges ou encore aller chercher des objets. Au registre des nouveautés de cette suite, le clone pourra désormais servir de téléporteur à notre héros et même si vous investissez dans l’arbre de compétence adéquate de bouée de sauvetage en cas de mort prématurée de son maître. Justement, l’arbre de compétence de Styx s’axe autour de 5 thèmes : Furtivité, Combat, Artisanat, Clonage et Perception. Chaque arbre possède au sommet la compétence d’expert à choisir entre deux qui requiert à la fois de l’expérience et un Quartz pour être déverrouillée. Les Quartzs sont des joyaux Elfiques assez difficiles à voler qui représentent les challenges bonus dans les niveaux. Même si les arbres sont fournis, la progression reste comme dans l’original légère et il est parfaitement possible de finir le jeu sans avoir maxer tous les arbres.

Toutefois, certains gadgets débloqués dans l’arbre d’Artisanat sont utiles au joueur dans les derniers niveaux du jeu. On pense notamment au Piège Toxique qui désintègre instantanément l’ennemi qui aurait le malheur de poser le pied dessus, très pratique pour coordonner des attaques et surtout faire disparaitre un corps à distance ! D’ailleurs, le jeu vous demandera de récupérer dans les niveaux des éléments de craft pour créer ces différents gadgets et armes. Comme précédemment, il reviendra surtout au joueur d’être inventif et de combiner pouvoirs et équipement pour tendre des pièges mortels aux gardes qui pullulent dans l’environnement. C’est d’ailleurs là que Styx devient extrêmement jouissif, lorsqu’après avoir planifié notre coup de maître pendant 10 minutes, on arrive à descendre une escouade sans se faire repérer et atteindre notre objectif en toute furtivité.

Et si vous n’arrivez pas à franchir certains niveaux, pourquoi ne pas tenter l’aventure à deux ? Faites appel à un rakash.. heu un ami dans le mode coopératif du jeu offert par des développeurs décidément très sympas. Là encore, le plaisir de coordonner ses attaques est de mise et vous n’aurez plus aucune raison pour ne pas faire péter les records de temps sur chaque niveau ! Mais c’est qu’il aurait tout pour plaire ce petit Styx. En guise de nappage chocolat sur ce gâteau, le studio a eu la très bonne idée d’abandonner leur techno maison pour travailler sur l’Unreal Engine 4. Il en ressort une mise en valeur immédiate des environnements visités à l’aide de modèles d’illumination modernes du plus bel effet et une distance de vue accrue. On note également un gros travail sur les modèles et visages des personnages du plus bel effet. Enfin, le jeu ne bronche même pas tous détails à fond sur notre GTX 1070 de test.

Alors Shards of Darkness est-il en tous points meilleur que son prédécesseur ? Et bien à notre grand regret non. On se souvient de la fin qui partait dans tous les sens et totalement pas raccord avec tout le jeu sur Master of Shadows, rebelote ici avec une fin honteusement télégraphiée dans une cinématique de 30 secondes chrono bourrée d’incohérences scénaristiques. Que se passe-t-il chez Cyanide ? C’est à croire que l’équipe manquait de budget en fin de production et c’est bien dommage, car cela vient jeter un voile sur l’excellente réalisation pendant les vingt heures de jeu. Et je pèse mes mots, le jeu est bien plus rythmé que son aîné et à une présentation digne d’un triple A avec des cinématiques de haute volée. Alors, pourquoi terminer ainsi ?! De même, les combats contre les boss sont toujours aussi peu inspirés et n’apportent rien au jeu. On aurait préféré qu’ils rajoutent un environnement supplémentaire à la place. Allez, tout ça sera corrigé pour le troisième épisode…

Bon

C'est en capitalisant sur ses acquis et en écoutant sa communauté que Cyanide à réalisé une très chouette suite à son excellent jeu d'infiltration. Styx: Shards of Darkness à tout d'une production AAA : un héros charismatique, une mise en scène généreuse et sérieuse, un gameplay aux petits oignons retravaillé avec amour pour en retirer le meilleur et surtout, surtout, un level design d'exception comme on en voit rarement dans un jeu vidéo de ce type. Alors certes, tout n'est pas parfait et c'est avec un petit pincement au coeur que nous ne remettrons pas la plus haute distinction au jeu, car il se rate sur les mêmes problèmes gênants qui avaient plombés son aïeul, malgré tout, ne passez pas à côté de ce titre qui a tout pour n’être rien de moins que le must de l'infiltration en 2017. Et rien que pour ça, il vaut le détour !

Jeu testé sur PC à partir d’une version fournie par l'éditeur. Plus d’informations sur notre politique de tests en suivant ce lien.

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