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Interview : John Ribbins (Roll7) pour le jeu Not A Hero

Not-A-Hero_BanItvDe passage sur Paris pour présenter son jeu à la presse française sous la bannière de Devolver Digital, le directeur créatif du jeune studio Roll7 nous a accordé quelques minutes pour parler de leur prochaine création : Not A Hero qui se présente comme un jeu d’action en 2D avec un système de couverture. Un jeu qui change radicalement de leur série à succès OlliOlli et nous avons souhaité en savoir plus sur le processus créatif du studio. Pour rappel, Not A Hero sortira le 7 mai prochain sur PC et plus tard sur PS4 et Playstation Vita.

JohnRibbinsConsole-toi: Comment vous sont venus en tête le concept et le scénario de Not A Hero ?
John Ribbins: En fait, au tout début nous voulions faire un tout autre jeu, un dungeon-crawler à mi-chemin entre Spelunky et Angry Birds. Vous deviez foncer la tête en avant dans des donjons générés aléatoirement avec comme seule arme un arc que vous auriez utilisé à la manière d’un Angry Birds. Ce prototype n’était pas vraiment fun à jouer. J’ai profité des vacances de Noël pour jouer à tout un tas de vieilleries et notamment Blackthorne, un des premiers jeux de Blizzard où vous retrouviez un système de couverture en 2D. J’ai trouvé ça cool et à l’époque je n’ai pas trouvé de jeux exploitant à nouveau cette mécanique originale. Enfin… depuis lors, on m’a montré un certain nombre de jeux qui utilisaient un système de couverture similaire (rires). Bref, à l’époque je me suis dit que ça serait vraiment sympa de faire, on a donc modifié notre dungeon-crawler pour en faire un cover-shooter et voilà.

Pour ce qui est de l’histoire complètement folle de Not A Hero, avant de bosser sur ce jeu, nous avions expérimenté un RPG, pas vraiment convaincant au final, mais qui comprenait des NPCs aux caractères générés aléatoirement, ce qui était aussi bizarre qu’amusant. A un moment, notre éditeur Devolver nous a demandé s’il y allait vraiment avoir une histoire derrière Not A Hero où s’il s’agissait juste de tuer des gens. Et nous avons réutilisé ce système de génération aléatoire pour justifier les massacres du jeu, on trouvait ça juste fun de faire tuer des gens à Bunnylord pour des raisons totalement absurdes. Finalement, on a mélangé ce concept de gameplay peu utilisé et ce scénario original et le tout donne un jeu qui fonctionne plutôt bien.

CT: Vous le dites vous-même, Not A Hero est plus proche d’un Gears of War que d’un run & gun classique. Pouvez-vous développer sur ce sujet ?
JR: Oui ce que je voulais dire par là est qu’on est plus habitués à voir des shooters 2D sous forme de run & gun où vous courrez dans un niveau en évitant les balles et en sautant par dessus des objets, ce que vous ne pouvez probablement pas faire dans la vie réelle… ouais en fait à bien y réfléchir vous n’avez pas non plus le droit de transposer ce que vous faites dans Not A Hero dans la vie réelle alors c’est pas forcément un argument mais bon… j’aime cette idée de système de couverture en 2D. J’aime Gears of War et également la série Kane & Lynch que je trouve assez cool et alors que OlliOlli essaye de retranscrire Tony Hawk en 2D, Not A Hero essaye peut-être de refaire ces deux jeux en 2D, c’est un challenge de design intéressant !

CT: Justement, gérer un système de couverture en 2D n’est pas chose facile. Quelles difficultés avez-vous rencontré pendant le développement du jeu ?
JR: Nous avons dû faire de nombreux retours en arrière durant le développement. Le jeu n’était qu’un prototype en 2012, à l’époque il y avait différents moyens de se mettre à couvert et différents types de couvertures. Puis nous avons commencé OlliOlli et sommes revenus sur Not A Hero après. Je pense que ce premier développement pour Devolver nous a appris beaucoup sur le design visuel et sur la manière d’apporter un langage visuel à nos jeux. Par exemple dans OlliOlli, nous n’utilisions qu’une seule couleur pour les éléments grindiables du jeu, ce qui aidait à la compréhension lorsque vous alliez très vite. Nous avons ensuite utilisé tout ce que nous avions appris pour enrichir le développement de Not A Hero. Dans ce titre, tout élément du décor peut être utilisé comme pour se couvrir. Vous devez être persuadé que tout ce que vous voyez dans la pièce est une planque potentielle parce que sinon, ce serait bizarre. Et en fait faire comprendre au joueur qu’il peut se planquer derrière tel ou tel objet est une grosse partie de ce qui nous a posé problème durant le développement de Not A Hero.

Un autre point très important lors du développement concernait les contrôles du héros. Depuis la première itération de Not A Hero, la première démo que vous avez pu tester à la Gamescom l’an dernier, nous nous remettons en question suite aux retours des gens qui nous disent « ok ça c’est pas terrible » « il faut refaire ça et ça » et notre discours a toujours été « ok, comment pouvez-nous vous rendre l’expérience de jeu la meilleure possible ». C’est fondamental pour nous.

CT: A propos du pixel art dans le jeu, ce choix est-il purement artistique ou dû à des limitations techniques ?
JR: Je n’ai jamais pensé que parce que le pixel art était « cool » il fallait faire un jeu en pixel art. Je fais des jeux depuis maintenant 20 ans que ce soit en garage ou plus professionnellement et j’ai toujours préféré faire des jeux en 2D. Bizarrement, si vous jetez un oeil à mon compte YouTube personnel, vous y verrez un prototype de jeux en 3D avec système de couverture que j’ai réalisé il y a six ans. Je ne l’ai jamais terminé, mais ça allait être un jeu entièrement en 3D. Donc est-ce que cela ne pouvait pas être fait avec une petite équipe ? Je pense plutôt que je préfère le style cartoon et que le challenge de devoir réaliser des animations spray en 2D est assez excitant.

Attention, je ne dis pas que les développeurs qui bossent en 3D ne sont pas des artistes, je respecte totalement les artistes 3D, c’est vraiment super dur de travailler en 3D. Mais vous voyez en 3D vous pouvez créer deux personnages et les animer avec le même set d’animations, c’est plutôt rapide. Ca n’est pas vraiment possible en 2D où si vous devez par exemple animer des gangsters et des flics, vous devez animer chaque personnage à la main, vous ne pouvez pas copier-coller les modèles d’animation. C’est ce genre de challenges que Jake, l’artiste de Not A Hero et moi-même adorons.

CT: Le gros point noir des jeux à système de couverture est l’IA qui est souvent stupide et se contente de vous foncer dessus. Comment se comporte t-elle dans Not A Hero ?
JR: Et bien, les ennemis sont stupides et vous foncent dessus (rires). Non en fait, dans les premiers prototypes du jeu, nous avions implémenté des ennemis plus intelligents et je pense que souvent lorsque vous essayez de faire des IA plus intelligentes, vous les rendez plus stupides, leurs mécaniques de prédictions de vos mouvements ne fonctionnent pas, etc. Si vous avez joué au premier prototype, une grande majorité des actions des ennemis sont basés sur des nombres aléatoires. Et en fait nous nous sommes aperçus que le jeu était plus fun lorsque les actions de l’IA étaient plus prédictibles. Vous savez que les ennemis vous fonceront dessus lorsque vous allez recharger, que les ennemis vont tomber si vous vous jetez sur eux, etc. Une grande partie des challenges se base sur votre habileté, votre vitesse d’exécution et votre timing. Il ne nous semblait donc pas juste de faire un jeu avec une IA aléatoire lorsqu’on vous demande une tâche bien particulière, c’est plus simple si vous apprenez à jouer avec, à prédire les actions de cette intelligence artificielle.

CT: A quoi peut-on s’attendre en termes d’événements aléatoires dynamiques en cours de mission ?
JR: Not A Hero n’est pas un Spelunky, vous n’y trouverez donc pas de niveaux générés aléatoirement. Dans bien des cas, Bunnylord justifie vos actions de meurtrier en série en vous envoyer flinguer des adversaires potentiels pour des raisons complètement loufoques dans les niveaux du jeu. En gros, le but de la majorité des missions du jeu sera de tuer des gens, mais pas problèmes avec ça parce qu’on vous dit que c’est pour sauver le monde comme Bunnylord vous l’expliquera dans le jeu. Les raisons pour lesquelles vous irez chercher tel ou tel objet, accomplir telle action ou tuer telle personne changeront à chaque run. Par contre, il s’agira toujours du même but.

CT: Le jeu est résolument orienté vers l’action. Y’aura t’il des phases plus calmes, peut-être même un peu d’infiltration dans la version finale ?
JR: Hélas non. Le système de score du jeu se base sur votre capacité à être un badass et à tirer dans tous les sens, le jeu vous récompensera de bonus de santé pour l’enchaînement de vos actions (tacles suivi de dézinguage, exécutions, close-combat, etc.). Le jeu vous pousse donc à être agressif, à jouer les John Woo. Ceci dit, vous pourrez choisir entre en grande variété de personnages, certains possédant pouvant tirer à une certaine distance des ennemis avec une grande précision donc si vous souhaitez vraiment jouer plus tactique en découpant vos actions à la manière d’un Blackthorne et profiter des faiblesses de vos ennemis, cela sera possible. Mais si vous voulez remplir absolument tous les objectifs de chaque niveau, notamment ceux impliquant un temps limite, vous devrez jouer plus agressivement à la manière d’un speedrunner.

CT: Après deux jeux acclamées par la critique, vous êtes évidemment attendus au tournant. Pas trop stressé à un mois de la sortie d’un projet vraiment différent d’OlliOlli ?
JR: Je suis ultra stressé ! (rires) Je ne sais pas, c’est étrange car j’ai eu cette conversation avec d’autres personnes aujourd’hui, les gens disaient « c’est un jeu très différent, pourquoi avoir choisi un thème si différent ? » et en fait nous avons fait les prototypes de Not A Hero et OlliOlli tous les deux durant la même année en 2012. Il n’était pas question de faire un jeu différent après OlliOlli, Sony nous a juste financé pour réaliser OlliOlli avant l’arrivée de Devolver. Mais je réalise qu’aujourd’hui, en tant que studio, Roll7 est connu pour ce jeu de sport ultra nerveux et développe maintenant un jeu d’action un peu malsain. En tout cas ce qui est sur c’est que nous avons littéralement réalisé trois jeux en deux ans et demi donc je pense qu’après la sortie et le support apporté à Not A Hero dans les mois qui viennent, nous allons prendre des vacances pendant un certain temps.

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